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Il
commençait à faire frais quand nous avons quitté
l’Autriche. Nous avons franchi la frontière et sommes arrivés
dans les Dolomites, grosses montagnes
trapues aux formes étranges où, à notre étonnement,
on cultive de la vigne. Et puis nous sommes arrivés, avec un coucher
de soleil magnifique, sur les rivages du lac de Garde.
Nous sommes restés très longtemps en Italie,
plus de deux mois, un record absolu, dont trois semaines en Sicile. Il
faut dire que nous y avons commencé l’école et le
rythme a bien dû changer, par la force des choses : nos immenses
journées de l’été se voyaient sévèrement
amputées. Et comme il y a par ailleurs de bien belles choses à
voir et à revoir en Italie …
En préambule, notre périple
« fresques »
Nous
sommes arrivés à Padoue un peu par hasard
mais nous avons vite compris que la chose à y voir, hormis la basilique
Saint-Antoine, était les fresques de Giotto dans la Chapelle Scrovegni.
Nous y sommes donc allés. La visite est très organisée
et encadrée : pas plus de vingt-cinq personnes à la fois
et pas plus d’un quart d’heure par groupe. Les visites se
suivent comme les mariages dans les mairies au mois de juin. Pourtant,
les choses sont très bien faites. On assiste avant la visite à
une projection très intéressante qui présente à
la fois Giotto dans son contexte et les différentes scènes
représentées dans le cycle de fresques. On peut ensuite
passer le quart d’heure statutaire à retrouver les scènes
déjà déchiffrées et à les apprécier.
C’est une façon de procéder qui rend la visite très
agréable. Cette première visite a été le début
d’une sorte de « périple fresques » tout aussi
improvisé que l'avait été notre « périple
Bach » en Allemagne. Après Giotto, nous sommes allés
voir les fresques de Masaccio à la chapelle Brancacci à
Florence, dans l’église Santa Maria Del
Carmine. Un éblouissement. Là aussi, une vidéo interprétait
les scènes et comblait nos lacunes bibliques. Les fresques de Masaccio
sont extraordi naires
d’émotion et méritent à elles seules que l’on
fasse le voyage à Florence. Nous avons ensuite retrouvé
Giotto à Assise mais les fresques très
abîmées, mal éclairées étaient plus
difficiles à apprécier. Notre périple fresque, en
pointillé, s’est poursuivi à Arezzo,
en Ombrie. Là, dans l’église San Francesco se trouve
la petite chapelle peinte à fresque par Piero della Francesca.
J’avais découvert ces fresques il y a une vingtaine d’années
et en avait été bouleversée. (Pour être tout
à fait honnête, elles étaient dans un état
déplorable et l’éblouissement m’était
venu dans la petite boutique où j’avais feuilleté
un peu distraitement un livre de reproductions !) Cette fois-ci, j’hésitais
à retourner les voir, pensant que leur état n’impressionnerait
personne et puis, par un sentiment de profonde admiration et d’émerveillement
pour Piero Della Francesca, j’y ai quand même poussé
tout le monde. A Arezzo, comme à Padoue, la visite était
contingentée et limitée dans le temps – mais là,
il n’y avait qu’un couple d’anglais à part nous,
et personne après nous. Et puis un miracle s’était
produit depuis ma dernière visite : un chantier de restauration
de grande envergure qui avait duré plus de deux ans, et à
l’issue duquel les fresques étaient redevenues éclatantes,
étonnamment lisibles et toujours aussi fascinantes. Les enfants
avaient chacun un audioguide qui leur expliquait les différentes
étapes de cette Légende Dorée racontant la découverte
de la Vraie Croix : la rencontre de Salomon et de la Reine de Saba, le
songe de Constantin, « l’invention » de la Vraie Croix
… Le guide, un peu surpris d’abord, a été très
gentil avec nous, nous a laissé rester aussi longtemps que nous
le voulions et a même montré aux enfants, à Clément
en particulier, jugé digne d’apprécier, un personnage
« qui avait oublié de mettre sa culotte » (sic), et
en effet, certain détail anatomique ne laissait aucune ambiguïté
sur l’oubli en question … Quelle merveille et quel bonheur
d’avoir pu revoir ces fresques dans d’aussi bonnes conditions
… Last but not least, dernier mais non des moindres, Michel-Ange
! Je tenais absolument à voir ces fresques célébrissimes
de la Chapelle Sixtine. Nous sommes donc allés au Vatican,
sommes rentrés dans ce dédale que sont « les musées
du Vatican » et sommes enfin arrivés jusqu’à
la fameuse chapelle. Nous y sommes restés un très long moment
la tête en l’air, le cou cassé, à essayer de
retrouver les différentes scènes, histoires, personnages,
préalablement repérés dans notre livre de reproductions.
Quant à Michel-Ange, on se sent un peu idiot de vouloir en dire
quoi que ce soit mais, quelle oeuvre ! C’est avec Michel-Ange que
se sont conclues nos pérégrinations, plutôt chronologiques
finalement, dans l’univers de la fresque.
En passant, La passegiata
A l’heure du déjeuner en Italie, tout se tait : les magasins
ferment, les rues se vident, la ville se replie à l’intérieur
de ses maisons et il ne reste plus dans les rues que quelques touristes
égarés et perplexes. Vers quatre heures, parfois plus tard,
les magasins ouvrent à nouveau. Les rues se réveillent.
On recommence à voir des passants, quelques uns d’abord,
puis d’autres. Une heure plus tard, le prodige quotidien s’est
répété : la rue principale n’est plus assez
large pour contenir le flot humain qui l’emplit. A quelques dizaines
de mètres pourtant, les petites rues restent tranquilles. Miracle
de la passegiata - la « promenade » - toujours recommencé.
Notre carnet de route.
Le Lac de Garde et Assenza, Torri del
Benaco (notre coup de coeur) et Sirmione
Notre
première étape italienne a été le Lac de Garde,
dont nous ne savions pas grand-chose. Après la fraîcheur autrichienne,
nous y sommes arrivés dans une douceur d’été
indien et notre premier bivouac a été une aire aménagée,
installée sur des terrasses d’oliviers en bordure du lac, dans
un petit village du nom d’Assenza. C’est là
que les enfants ont commencé l’école, la vraie, celle
du CNED. Après leur première matinée studieuse, je
les ai emmenés passer un long moment sur la plage de galets en contrebas,
notre première plage depuis les plages du nord. Il faisait délicieux,
c’était un rêve. Le Lac de Garde quant à lui est
un endroit assez magique. Il est tellement grand que l’on a du mal
à ne pas se croire au bord de la mer. Assez loin, on aperçoit
des montagnes et on se croit en Corse (du moins quand – comme moi
– on n’y est jamais allé !) Partout, des champs d’oliviers.
Après
Assenza, nous avons longé la rive du lac jusqu’à un
petit village merveilleux, notre coup de cœur absolu : Torri
del Benaco. Nous étions installés sur le grand
parking – désert – au pied des murailles et le petit
port était de l’autre côté de celles-ci, à
une centaine de mètres. Un petit port « de poupée
», bordé de cafés et de belles bâtisses nobles.
Pas de voitures, ou presque. Un petit marchand de légumes avec
son étalage coloré. Un marchand de journaux. Sur le fond,
vers la gauche, la petite rue principale. Elle traverse le village de
part en part pour arriver à une place et son église. De
chaque coté de cette rue principale partent des petites
rues étroites, les unes vers le bord du village, les autres ramenant
à la mer – pardon, au lac. A Torri del Benaco, comme son
nom l’indique, il y a aussi une petite forteresse crénelée,
à l’échelle du village. Tout y est charmant et les
cappucino pris le matin à l’une des terrasses de café
du petit port, devant le lac, à côté du château
… ont une saveur particulière. Camille y a même fait
son école un matin, devant un chocolat chaud. Nous nous sommes
un peu attardés à Torri del Benaco et n’en sommes
partis qu’après nous être promis d’y revenir.
Notre
troisième et dernière étape sur le Lac de Garde a
été Sirmione, un village fortifié
assez réputé, construit tout au bout d’une péninsule.
Encore une fois, on se croirait au bord de la mer. On y entre par un pont-levis
sur l’eau puis par une porte imposante dans les murailles crénelées.
Sur la droite, tout de suite, la forteresse. Derrière elle, le
port militaire, ceint lui aussi de hautes murailles crénelées
sur quatre côtés avec une étroite ouverture pour laisser
entrer et s’y abriter les bateaux de la flotte de guerre. A l’intérieur
du village, une rue principale où doivent – malheureusement
– se faufiler les voitures qui rejoignent les hôtels de luxe
à l’autre extrémité de la péninsule.
Et puis des petites places, et des ruelles qui toutes ramènent
au bord de l’eau. L’ensemble est très pittoresque et
nous y déambulons avec plaisir. Nous sommes contents toutefois,
de ne pas nous y trouver en saison estivale, la ville pourrait vite prendre
des allures de Mont-Saint-Michel … Tout au bout de la péninsule,
hors la ville, les vestiges d’une immense villa romaine : la Villa
dite de Catulle. C’est notre première villa romaine et nous
y passons un long moment, ainsi que dans le petit musée où
les mosaïques retrouvées ont été mises à
l’abri. Nous passons la nuit sur l’immense parking à
l’extérieur de la ville avec une petite centaine d’autres
camping-cars, tous bien rangés les uns à côté
des autres, italiens pour la plupart. C’est une expérience
assez amusante car plutôt unique dans notre « grand tour ».
L’Italie du Nord Vérone
Padoue
Nous
sommes passés à Vérone en venant
du lac de Garde et y avons fait une étape d’une journée.
C’est notre première « grande » ville italienne.
Les arènes sont impressionnantes – bien qu’après
Pula (et El Jem en Tunisie il y a deux ans), nous soyons devenus assez
difficiles. Une longue déambulation agréable et un camping
sur les hauteurs avec vue magnifique sur la ville. Le lendemain de notre
départ, le camping fermait pour l’hiver. Ca y est, nous sortions
vraiment de l’été pour entrer – non sans déplaisir
– dans la « morte » saison.
A Padoue, nous avons rencontré
à la basilique Saint-Antoine la dévotion, phénomène
tangible, étrange et assez émouvant finalement. Nous avons
aussi - ironie du sort - perdu ( !) notre Guide du Routard, précieux
il faut bien le dire. Nous avons aussi vu les fresques de Giotto à
la Chapelle Scrovegni (cf « périple fresques) et, encore
une fois, beaucoup déambulé.
Venise
Que
dire de Venise ! Nous y étions allés chacun de notre côté,
nous y étions retournés en amoureux, nous y voilà
en famille. Chaque fois, le charme est retrouvé, nous sommes des
inconditionnels. Clément y a fêté son anniversaire
: il en était si fou de joie qu’il ne pouvait s’empêcher
de le dire à tout le monde et a déployé une énergie
dont il est seul capable à amener le sujet dans toutes les conversations
et auprès de toutes les personnes avec lesquelles nous venions
à échanger quelques mots ! Il faut dire que fêter
son anniversaire à Venise ... Pour
l’occasion, nous avons fait ce que nous n’avions encore jamais
fait : un tour en gondole. Nous avions déjà beaucoup arpenté
Venise pourtant, mais la gondole, et c’est le côté
magique, passe dans des endroits inaccessibles à pied, derrière
les palais, entre des palais, au pied d’églises, devant de
tout petits débarcadères … Puis on se retrouve subitement
dans l’immense Canal Grande et on a peur de chavirer au passage
des vaporettos avant de retrouver l’étroitesse rassurante
d’un canal étroit. On baisse la tête sous les ponts,
on s’amuse de la manœuvre quand il faut croiser une gondole
en sens inverse et déjà, on est de retour à l’embarcadère.
Un souvenir magique.
A
Venise, nous avons suivi une visité guidée passionnante
– et gratuite ! – des mosaïques de la Basilique Saint-Marc,
une visite qui n’a pas lieu tous les jours mais pour laquelle nous
avons passé un jour de plus à Venise et ne l’avons
pas regretté. Nous avons souvent repensé à cette
élégante dame française, mariée à un
vénitien et installée à Venise depuis vingt-cinq
ans. Sa visite guidée et ses explications savantes nous ont passionnés.
De plus, tout ce que cette dame nous a appris à voir dans ces mosaïques,
tous les symboles mystérieux, les récits, les personnages,
nous les avons retrouvés dans les autres mosaïques byzantines
que nous avons vues par la suite à Ravenne mais aussi à
Palerme dans la Chapelle Palatine et à Monreale – à
quelques kilomètres de Palerme – dans la Cathédrale.
Une belle introduction aux mosaïques byzantines.
Nous
sommes aussi allés par un jour de beau soleil déambuler
dans les petites rues de l’île de Murano,
comme une Venise pour les petits, plus calme, plus simple, plus humaine
peut-être, et toute colorée.
Sur la place Saint Marc, Christophe et les enfants sont
montés en haut du Campanile au moment même où les
cloches se mettaient à sonner ! Souvenir mémorable ! Pour
fêter l’anniversaire de Clément, nous sommes allés
boire un chocolat chaud au très chic café Florian. Et les
enfants, pour leur plus grande joie,et devant ma mine dégoûtée,
ont trouvé très amusant de nourrir les pigeons et de s’en
faire assaillir – sur les bras, les mains et jusque sur la tête
!
Ravenne et ses mosaïques
Justinien et Théodora
Il
faut bien sûr absolument aller à Ravenne pour ses mosaïques.
Ravenne, capitale un temps de l’empire byzantin, en a hérité
l’art et la manière des mosaïques. A l’église
San Vitale, les mosaïques représentant la cour de l’empereur
Justinien et de l’impératrice Théodora sont saisissantes.
De Ravenne aussi les célèbres colombes, que l’on retrouve
dans plusieurs églises. La ville est également pleine de
charme avec ses nombreuses places et ses ruelles piétonnes très
animées à l'heure de la passagiata. Ravenne est un lieu
un peu à part, une sorte d’étape en soi, une ville
à laquelle on rend hommage pour elle et qui n’appartient
qu’à elle.
Toscane Ombrie : Assise Sienne Florence
Pise San Giminiano Arezzo Pérouse Orvieto
Qui
dit Italie dit Toscane. Aller en Italie, c’est forcément
aller en Toscane, au moins la première fois, et c’était
la première fois des enfants. Nous sommes passés dans de
nombreux hauts lieux toscans et aussi ombriens.
A Assise, nous avons retrouvé Giotto. Nous avons
aussi « rencontré » Saint-François dans la douce
lumière quasi surnaturelle des collines plantées d’oliviers,
et dans le sourire accueillant des frères franciscains de la basilique.
Dans la petite ville, nous avons été séduits par
les magnifiques maisons de pierre, témoins d’un riche passé.
Sur la grand-place, nous nous sommes amusés de ce temple romain
aux énormes colonnes, reconverti en église, un peu à
l'étroit entre les deux hautes maisons qui le jouxtaient. Un peu
plus loin, c’était la rencontre de Sainte Claire à
la petite église du bout de la ville où elle repose.
Après
Assise, merveilleuse de paix et de douceur, nous sommes allés à
Sienne, toute bruissante d’agitation. Tout le monde
est tombé sous le charme de cette petite ville. Il faut dire qu’elle
a beaucoup pour plaire. Nous y avons visité le Palazzo Pubblico
- le grand édifice au bas de la Piazza del Campo - mais la très
haute « Torre Del Mangia » qui le domine était fermée.
Ouf ! J’en gardais un souvenir épouvantable (escalier de
bois au dessus du vide pour arriver tout en haut. Je suis sûre que
les enfants et Christophe n’auraient eu aucune pitié et auraient
voulu que je les accompagnasse. A Sienne, nous avons aussi assisté
et même suivi le défilé des contrades en l’honneur
du Saint patron de la ville. Les enfants racontent cet épisode
dans leur « Espace enfants » (ici).
C’est aussi à Sienne que j’ai dû me résoudre
à aller chez le dentiste après que des maux de dents très
pénibles depuis plus d’un mois finissent par m’en donner
le courage. Le dentiste, un hollandais, avait affiché une reproduction
du tableau de Vermeer « La Jeune Fille à la Perle »
dans sa salle d’attente, un tableau qui m’a toujours beaucoup
touchée. Les choses ne pouvaient pas trop mal aller. (Et en effet,
tout s'est bien passé, ouf !)
C’est à Sienne encore que totalement bloquée par un
lumbago affreusement douloureux, j’ai dû aller à l’hôpital
chercher un soulagement. Piqûre et ordonnance. Une démarche
de vieille femme pendant encore quelques jours et je suis progressivement
redevenue la jeune fille que certains d'entre vous connaissent.
De Sienne, nous sommes partis pour Florence
qui possède, entre autres richesses, un magnifique camping sur
une colline plantée d’oliviers ! On en domine toute la ville
et l’on peut descendre à pied par un magnifique escalier,
jusqu’à l’Arno et le Ponte Vecchio.
Le
Musée des Offices de Florence est une sorte d’anthologie
de la peinture italienne. A vouloir tout regarder, il faudrait y passer
plusieurs jours. Nous y avons passé deux bonnes heures et vu …
onze tableaux ! Nous avions acheté un peu par hasard en entrant
à la librairie du musée un petit livre pour enfants : sur
chaque page, la reproduction de l’un des tableaux célèbres
du musée et en vis-à-vis, quelques notations. Nous avons
joué à retrouver ces tableaux dans le dédale des
salles puis à les regarder. Onze tableaux bien regardés,
ce n’est déjà pas si mal … ! Un peu plus tard,
nous sommes tombés par hasard, dans le porche du duomo de San Giminiano,
sur une copie de l’annonciation de Léonard de Vinci que nous
avions justement vue à Florence : les enfants l’ont reconnue
avant nous !
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